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Espace disponible, facilitateur du réemploi de matériaux

Au sortir de leur études d’architecture et de design, Hugues, Robert et Paul se laissent guider par leur souhait de bâtir autrement en développant une pratique différente de celle qu’ils ont connu, comme réponse aux enjeux liés à l’épuisement des ressources et l’accumulation de déchets. En octobre 2022, ils créent Espace Disponible, un bureau d’études spécialisé dans le réemploi qui opère en tant que facilitateur de la valorisation des matériaux issus de la déconstruction et des co-produits industriels.

Exercice Zéro

Quoi de mieux pour se lancer que d’expérimenter soi-même ? Pour « se faire la main », les jeunes étudiants choisissent de concevoir et d’auto-construire leur propre atelier, constitué à 50% de matériaux issu du réemploi. Ils établissent ainsi leur résidence au Quartier Libre de Rouen, place forte d’une économie locale, sociale et solidaire au service de la vie culturelle et artistique de la ville. Pour faire bonne figure, ce nouvel espace portera le nom d’Exercice Zéro.

En quête de sites en mutation, le collectif répond à un Appel à Manifestation d’Intérêt lancé la même année, dans le cadre du démantèlement d’un tiers-lieu installé sur le site des anciens abattoirs de Rezé, aux portes de Nantes. Leur dossier est retenu pour le démontage d’un atelier en ossature bois de 70m². Au total, pas moins de 5 tonnes de matériaux sont transportées jusqu’au Quartier Libre pour y reprendre forme !

L’idée est d’expérimenter et de développer d’autres systèmes, sans pour autant conditionner l’écriture du projet au réemploi, mais bien de le considérer comme un outil au service d’une certaine qualité architecturale.

Aidés du Reuse Toolkit, un guide visant à faciliter le réemploi des matériaux et produits de construction à l’échelle européenne, chaque élément est minutieusement étudié puis catalogué. En vue de maximiser la réversibilité des matériaux récupérés, certains éléments du dessin initial doivent être reconsidérés. Ainsi, la charpente se voit rallongée pour pouvoir accueillir une nouvelle gouttière, réalisée à partir de cornières. La descente d’eau se fait à la japonaise, le long d’une chaîne. Les portes et baies vitrées sont transformées mais toutes réutilisées. Le mobilier est également issu du réemploi, prospecté localement. Chaque assemblage a été pensé pour être réversible et minimiser les pertes lors du démontage futur de l’atelier en 2031 (fin d’occupation du site SNCF Saint-Sever).

Militant pour une pratique collaborative et horizontale de l’architecture, le collectif choisit, au travers de ce premier projet, l’auto-construction comme moyen pour éprouver leur dessins sur le terrain, mais aussi pour recréer du lien, faciliter les rapports avec les artisans. Favorable à l’ouverture des espaces comme lieux d’expérimentation, Exercice Zéro accueille de nombreux étudiant·es venu·es convertir leur savoirs en savoir-faire, à l’occasion de chantiers participatifs, d’ateliers, ou pour leur stage d’été.

Une pratique collaborative et multi-échelle

Plusieurs partenariats sont par ailleurs menés avec des établissements d’enseignement supérieur. L’été dernier la mise en place d’un programme de recherche estival, le Summer Lab, a permis à un étudiant d’UniLaSalle de conduire des recherches sur la valorisation de déchets issus de l’industrie agro-alimentaire – tels que des fibres de cosses de cacao et de toiles de jutes broyées – en vue d’une application potentielle dans le bâtiment (éléments de second œuvre, bardage, couverture, systèmes de remplissage de plancher). A l’ENSA Normandie, des chantiers pédagogiques sont organisés pour sensibiliser les étudiant·es à une pratique architecturale plus respectueuse de l’environnement, où le recyclage et les énergies renouvelables sont la norme, tout en abordant des notions transversales au dessin et à la mise en œuvre : le poids du trait et l’économie du geste.

Espace Disponible a par ailleurs accompagné plusieurs expérimentations des étudiants de l’ENSA et d’UniLaSalle dans le cadre du projet Maillons : développement de systèmes constructifs biosourcés, expérimentation des savoir-faire vernaculaires, caractérisation des matériaux, compréhension des processus industriels de transformation des agro-ressources, etc …

Le réemploi doit servir les projets, et non l’inverse

D’une expérience ayant permis de transformer des petites sections de bois de grandes longueur en éléments structurels sans clous ni vis, à la conception du plancher en réemploi d’une maison isolée en paille … chacun de ses projets, ayant été documentés, faisant l’objet d’une micro-édition, ou par leur simple existence, participent à rendre visible cette pratique encore en marge des systèmes conventionnels.

Assurabilité et nouveaux métiers

La question de l’assurabilité des produits ou systèmes issus du réemploi s’est rapidement posée, ainsi que celles relatives aux responsabilités associées à ce nouveau type de métier.

A quelques exceptions près (recommandations professionnelles du Centre Technique Industriel de la Construction Métallique sur le réemploi d’éléments structuraux en acier, travaux en cours de la Chambre Syndicale Française de l’étanchéité sur la préparation de règles professionnelles pour le réemploi des éléments métalliques de bardage …), le réemploi est aujourd’hui majoritairement considéré comme relevant de la technique non-courante. Afin de présenter aux assureurs des produits, équipements et matériaux dont la durabilité des performances est justifiée, la qualification des produits constitue donc un acte essentiel.

Nous œuvrons auprès des bureaux de contrôle, des fournisseurs et des artisans pour faire correspondre les éléments aux attentes normatives et assurantielles.

La filière du réemploi entraine avec elle l’émergence de nouveaux métiers. Il s’agit bien sûr des diagnostiqueurs, mais également d’autres professions tels que les qualificateurs, AMO Réemploi, maîtres d’œuvres dédiés, bureaux de contrôle avec missions spécifiques, reconditionneurs, plateformes de stockage et de revente, etc. La présence de tels interlocuteurs, formés et expérimentés, constitue un point sécurisant dans l’évaluation assurantielle des dossiers présentés. C’est précisément l’objet des travaux menés par Espace Disponible.

Et la suite ?

Espace Disponible opère en tant que bureau d’étude réemploi, engagé dans la valorisation des matériaux issus de la déconstruction et des co-produits industriels. Avec une expertise technique et réglementaire, leur objectif est d’avancer des solutions économiquement viables tout en réduisant leur impact environnemental. Soutenu par un réseau de confiance et des partenaires spécialisés dans le réemploi, le groupe se positionne comme un collaborateur déterminant pour l’intégration des matériaux de réemploi dans un projet. En accompagnant architectes, maîtres d’ouvrage, collectivités et entreprises, Espace Disponible conçoit des solutions en harmonie avec les principes de l’économie circulaire.

Par ailleurs, le groupe a été retenu pour prendre part à l’exposition « 4° Celsius entre toi et moi » portée par l’ENSA de Versailles, qui se déroulera à la Petite écurie du château de Versailles du 6 mai au 13 juillet, dans le cadre de la Biénnale d’architecture et de paysage d’Île-de-France (Bap! 2025).

À travers cette exposition, les commissaires Sana Frini et Philippe Rahm vous invitent à explorer des solutions vernaculaires issues des latitudes plus chaudes, à découvrir les pratiques contemporaines qui y répondent déjà, et à imaginer l’avenir des villes de l’Île-de-France adaptées à ce nouveau climat. Ensemble, réfléchissons à une architecture et à des espaces urbains capables de préserver la vie sous toutes ses formes face à ces bouleversements.

ESPACE DISPONIBLE

Hugues Droesch, Robert Harding et Paul Mazzalovo.

contact@espacedisponible.org / 06 19 94 72 46

1, rue Malouet – Le Quartier Libre, 76100 ROUEN